Les districts de Tuléar I et II, de Sakaraha ainsi que de Betioky sont en alerte rouge depuis le passage de la forte tempête tropicale Jasmine dans le Sud-ouest de l’île au mois d’avril, rapporte le bulletin conjoint sur la Sécurité Alimentaire Nutrition et Alerte Précoce en date du mois d’avril 2022. Mais bien que les cyclones aient été particulièrement destructifs cette année, la partie sud de Madagascar a depuis longtemps été une grande poche de malnutrition aigüe. La sècheresse endémique en est une des principales causes. Les solutions pour y faire face sont à portée de main, mais exigent la contribution de tous les acteurs des différents secteurs, ainsi qu’une véritable volonté politique.
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Une enfant portant un seau d’eau à Ampototse, Toliara II
La prévalence de la Malnutrition Aigüe Globale dans l’ensemble des trois régions du Sud de Madagascar est de 9,5 % en Mars-avril 2022. La situation s’est améliorée dans le Sud, cela dit, cette amélioration est précaire, rapporte le bulletin conjoint sur la Sécurité Alimentaire Nutrition et Alerte Précoce. En effet, la sécheresse qui sévit depuis quelques années est loin d’être solutionnée. Même les rizières d’Ankililoaka, dans le district de Toliara II, sont asséchées, faute de pluie suffisante. Pourtant, Ankililoaka est réputé pour être le silo de la région Atsimo-Andrefana. Lors d’une descente effectuée par le Réseau des Champions pour la Nutrition Madagascar (CHANUT MADA), l’ONG Action Contre la Faim (ACF) et la plateforme HINA dans cette région, dans le courant du mois de mai, de nombreuses solutions d’adduction d’eau ont été suggérées par les différents acteurs locaux.
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Mairie de la commune rurale d’Ankililoaka
Système de pompe de forage solaire
Pour Christian Tiena Sokorokana, coordonnateur de l’Office Régional de la Nutrition (ORN) d’Atsimo Andrefana, on peut très bien exploiter l’eau des nappes souterraines ainsi que le potentiel solaire dont la région dispose. « En mission dans la campagne de Betioky, j’ai pu voir une installation de pompage solaire qui permet d'alimenter en eau un château d'eau », témoigne-t-il. « L’eau dépassait la capacité du château d'eau, si bien que le gardien devait couvrir le panneau solaire pour qu’il n’y ait plus de surproduction », renchérit-il. Ainsi, contrairement à ce que beaucoup semble croire, le sous-sol du Sud de Madagascar renferme de l’eau. Un système de pompe de forage solaire pourrait, donc, être une réponse à la sècheresse qui gagne de plus en plus la région Atsimo Andrefana.
Alain Claude, président de l’Association des Usagers de l’Eau (AUE) du Canal Rive Droite d’Ankililoaka, est du même avis que le coordonnateur de l’ORN, en ce qui concerne le forage. Il a toutefois fait remarquer que le coût d’une telle infrastructure ne pourra pas être supporté par les simples paysans de cette commune. Ils ont déjà fait estimer le projet et le coût s’élève à 200.000.000 Ariary pour un système de forage pouvant alimenter en eau un terrain sec de 30 ha, alors pour irriguer les plusieurs hectares de rizières que possèdent Ankililoaka, il faut certainement des milliards d’Ariary. Le Canal Rive Droite, à lui seul, devrait irriguer 2 000 ha de rizières, mais en ce moment, seulement 1/3 sont alimentées correctement en eau, se plaignent les usagers de l’eau de ce canal. « À cause de la sècheresse, la commune d’Ankililoaka ne produit plus que 500 kg de riz par hectare, alors qu’auparavant, notre production rizicole était de 5 tonnes par hectare. », affirme Alain Claude.
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Christian Tiena Sokorokana, coordonnateur de l’ORN d’Atsimo Andrefana
Barrage d’eau
Pour certains districts de la region Atsimo Andrefana, l’eau est déjà disponible, mais sous-exploitée. Le district de Betioky Atsimo possède l’Onilahy, une rivière qui ne tarit jamais, renseigne Falinirina Manoela Randriamanga, chef du District. Sur les 14 communes qui composent Betioky Atsimo, seule la commune de Tameantsoa exploite à fond la rivière, se désole le haut fonctionnaire. Géographiquement parlant, le district est divisé en deux par l’Onilahy. Les 14 communes d’Avaradrano, celles qui se trouvent au nord de la rivière, se développent mieux, comparées aux 16 communes d’Atsimondrano, celles qui se trouvent au Sud. Le fait est que les premières communes sont plus proches de la rivière et peuvent l’utiliser. Atsimondrano pourrait aussi en profiter, à condition de mettre en place des barrages. Mais tout comme le forage, ériger un barrage coûte une petite fortune. Le district aurait besoin de l’appui de l’Etat et des partenaires financiers pour réaliser ce projet d’envergure.
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Falinirina Manoela Randriamanga, chef du District de Betioky Atsimo
Système d’arrosage goutte à goutte et reforestation
D’autres solutions d’adduction d’eau sont envisageable, telle que l’installation d’un système d’arrosage goutte à goutte afin de ne pas gaspiller l’eau. C’est, en tout cas, une autre solution proposée par le coordonnateur de l’ORN d’Atsimo Andrefana. En outre, il est tout aussi important de penser à préserver l’environnement, en luttant, par exemple, contre la déforestation. C’est pourquoi, Parfait Fitahiananahary, maire de la commune rurale d’Ankililoaka, a pris comme engagement de promouvoir la reforestation. L’élu a, en effet remarqué que la diminution du nombre d’arbres a impacté la pluviométrie, alors qu’Ankililoaka est une commune qui a une grande capacité productive.
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Parfait Fitahiananahary, maire de la commune rurale d’Ankililoaka
Beaucoup moins coûteux et beaucoup plus rapide à construire qu’un pipeline, ces solutions proposées par les élus, les dirigeants et les acteurs locaux ont, bien évidemment besoin du concours des partenaires techniques et financiers. Mais leur réalisation demande, notamment, de la volonté politique, dans la perspective d'apporter des solutions endogènes à des problèmes endogènes, comme le revendique Christian Tiena Sokorokana.
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