"Sans les filles, il n'y aurait plus aucune activité" à Nosy Be, titrait le journal Libération de la semaine dernière. L'enquête coïncide avec la reprise du tourisme dans cette île très prisée de Madagascar. Célèbre mondialement pour être la ville parfumée d'ylang-ylang, NosyBe est aussi, et malheureusement, réputée pour ses filles, prêtes à offrir du plaisir sexuel aux touristes, parfois, contre des sommes dérisoires.
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Sur la plage de Nosy Be, les filles espèrent trouver des "vazaha" qui pourraient subvenir à leurs besoins
Encouragées par les parents
La pauvreté est toujours la première évoquée quant aux raisons de cette prostitution à peine déguisée qui salit la renommée de Nosy Be. Certaines personnes dénoncent la tentation de l'argent facile tandis que la plupart des "filles de joie" sont bercées par l'espoir de contracter, un jour, un mariage d'amour avec un riche "vazaha". Cependant, nombreux de ces étrangers attirés par Nosy Be, sont surtout, à la recherche de jeunes filles, pauvres, bien sûr, et docile. L'ONG ECPAT affirme qu'une fille sur 2, dans l'île parfumée, a eu sa première expérience sexuelle dans le cadre de la prostitution. Un rapport du département d'État américain de 2021, cité par la Libération, explique que "Les parents encouragent les filles, dès l’âge de 15 ans, à devenir financièrement indépendantes en s’adonnant au commerce du sexe avec des touristes étrangers". Avant cela, une enquête réalisée par l'ECPAT entre 2017 à 2020 a révélé, après interrogation de 92 prostituées de Nosy Be, que « Des parents exténués par la précarité voient dans la prostitution infantile une opportunité de conforter leurs revenus ».
Pratique qui se transmet
Mais quels revenus ?! Avec un Malgache, une fille pourrait ne gagner que 2 000 Ariary ou tout au plus, 10.000 Ariary. Avec un étranger, la passe pourrait rapporter jusqu'à 40.000 Ariary ou plus, d'après l'enquête du journal. C'est mieux que rien, car cette somme pourrait subvenir aux besoins essentiels de la famille pendant deux ou trois jours. Généralement, les jeunes filles ne peuvent pas espérer plus. Vendre son corps devient, ainsi, une pratique courante, qui se transmet de mère en fille, sans gêne ni honte. Les plus chanceuses continuent d'être entretenues par leurs clients, une fois que ceux-ci sont de retour dans leur pays. Peut-être par pitié, peut-être par nostalgie... Les miraculées voient leur rêve de mariage se réaliser, mais c'est rare.
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Puni par le code pénal
En cette journée mondiale du tourisme, célébré tous les 27 septembre, ECPAT France Madagascar et la plateforme de la société civile pour l'enfance (PSCE) appellent tous les acteurs du secteur tourisme à lutter contre le tourisme sexuel, notamment aux exploitations sexuelles des enfants à des fins transactionnelles. "Les enfants ne sont pas des attractions touristiques", s'insurge le PSCE. Étant donné que le thème retenu pour cette année est " Repenser le tourisme", tous les acteurs œuvrant dans le domaine du tourisme devrait « repenser leur façon d’aborder le tourisme en faveur d’un tourisme plus durable, plus inclusif et plus résilient », plaide la plateforme. La lutte contre ce fléau qui détruit les jeunes filles malgaches est l'un des garants de ce tourisme durable.
A noter que le code pénal malgache concernant la prostitution sur mineur, dispose dans son article 334 que " Quiconque aura consommée des rapports sexuels avec un enfant contre toute forme de rémunération ou tout autre avantage est puni de la peine d’emprisonnement de deux (02) à cinq (05) ans et d’une amende de 1 000 000 Ar à 10 000 000 Ar ou l’une des deux peine seulement. La tentative est punie des mêmes peines ».
Les deux entités incitent, en outre, tout un chacun à signaler toutes les situations d'abus et d'exploitation sexuels, à la police ou à la gendarmerie nationale ; ou en appelant gratuitement la ligne verte 147 ; ou en écrivant sur les sites www.arozaza.mg ou sosherisetra.mg.
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