Madagascar a respiré le vent de la démocratie au début des années 1990. Dès lors, l’échiquier politique a commencé à s’intéresser au pluralisme politique. Cependant, bon nombre d’observateurs affirment que les valeurs de l’opposition sont actuellement bafouées. Parmi eux, Samihary Floriot, président national du parti politique TAMAMI, qui s’exprime sur ce sujet.
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Samihary Floriot, président national du parti politique TAMAMI
Crise politique et social interminable
« Rien ne va plus ! » Tel est le constat du président national du parti politique TAMAMI, Samihary Floriot face à la situation actuelle à Madagascar. « L’inflation est insupportable. La crise sanitaire a sévi et les tensions politiques ont envenimé la situation. Il est difficile de dire si les élections de 2023 pourront changer les choses»craint-il. Selon ce politicien, si une crise sociale persiste, cela résulte d’une crise politique causée par l’État elle-même. « Nos lois sont bafouées. La constitution précise à l’article 65 alinéa 5 que « Le Premier Ministre, Chef du Gouvernement assure l'exécution des lois ». Mais est-ce réellement le cas ? Ne nous étonnons pas, alors, si cette crise politique n’a aucune porte de sortie », poursuit-il. Samihary Floriot n’a pas manqué de rappeler l’utilité de l’opposition dans une démocratie. Le gouvernement actuel va déjà entamer sa dernière année avant les élections présidentielles de 2023. Force est de constater que les chefs de l’opposition des chambres basse et haute ne sont même pas encore nommés. Où nous mèneront les prochaines élections si l’État brigue l’opposition, se demande-t-il ?
Application de la charte de l’opposition
Si le gouvernement clame haut et fort qu’il prône le respect de la démocratie, le parti TAMAMI, quant à lui, proteste ces dires. L’opposition a, dans les démocraties, plusieurs fonctions. Les valeurs de la démocratiesont de donner ses droits à l’opposition et c’est annoncé dans la constitution, affirme son président. « Si Madagascar est vraiment un pays démocratique, l’État devrait assurer l’exécution des lois. Prenons exemple de la charte de l’opposition : la loi 2011-013,qui a été promulguée le 09 septembre 2011 et a été inscrite dans le journal officiel du 11 septembre 2011. Pourtant, 11 ans après, ladite loi n’est pas encore appliquée. Pourquoi attendre le projet de loi PL n°01-2019, qui modifie certaines dispositions de la loi n°2011-013, proposée par le député IRD,RAZAFINTSIANDRAOFA Jean Brunelle ? Jusqu’à présent cette proposition est encore mise en instance ». Le président du parti TAMAMI martèle que les élections prochaines seront favorables à l’État et les décisions seront unilatérales. Madagascar, alors, ne sera pas à l’abri d’une crise post-électorale.
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RAZAFINTSIANDRAOFA Jean Brunelle, député élu à Ikongo
Crédit photo: Anak’i Sandragnanta Ikongo
Apaisement politique
Selon toujours les explications de Samihary Floriot, la Grande Île a une mauvaise image surtout sur le plan stratégie politico-internationale. « Rappelons que la décision de l’ État face à la guerre Ukraine et Russie nous a mis dans une position inconfortable au niveau diplomatie. Nous ne sommes plus en bon terme avec l’ OTAN. Notons que l’Union Européenne nous rappelle à chaque fois de faire marche arrière sur notre décision de neutralité » avance-t-il. Ne soyons donc pas étonné si les résultats des présidentielles de 2023 seraient contestés par l’opposition etseraient approuvés par la Communauté Internationale, poursuit-il. Il est temps de rétablir le calme et d’avancer vers un apaisement politique, préconise ce politicien.
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Crédit photo: Délégation de l’Union Européenne à Madagascar et en Union des Comores
Accord politique pour un gouvernement de concensus
« Face à la situation de crise actuelle, l’heure est venue de permettre à l’opposition d’être un acteur de développement, selon la constitution. Une concertation nationale est de rigueur » solutionne le TAMAMI. Par contre, le parti exige urgemment un accord politique. C’est par le biais de ce dernier que nous pouvons aboutir à un apaisement politique, certifie-t-il. Selon lui, un accord politique est facilement maniable dès sa ratification, le pays pourra transiter à un gouvernement de consensus qui aura pour mission d’organiser la fameuse concertation nationale.
Opposition dispersée par les urnes en 2023
Le TAMAMI rappelle que seul son parti et le Tiako i Madagasikaraont été annoncé par le ministère de l’intérieur et de la décentralisation devant la chambre basse et la chambre haute. Force est de constater que les partis politiques, se déclarant opposition, montent en flèche. A l’allure où vont les choses, l’opposition sera en ordre dispersé pour affronter les urnes, rapporte le président du parti. « Pour l’instant, l’opposition partage une cause. Concernant le TAMAMI particulièrement, nous protestons le programme du Président de la République et non sa personne. Nous avons réclamé un changement de constitution, mais nos appels ne furent pas écoutés. Par contre, pour les élections, ce sera autre chose pour l’opposition. Chacun a son programme. Mais l’un des grands problèmes à Madagascar, c’est que tout le monde veut être le leader. Il sera impossible de déterminer un candidat de consensus pour l’opposition», avertit-il. En somme, l’État devrait appliquer les lois concernant l’opposition pour apaiser l’atmosphère politique et social dans le pays. A titre de rappel, l’opposition constitue un contre-pouvoir afin d’éviter que la majorité présidentielle n’ait la tentation de mener une politique portant atteinte aux droits et libertés. Elle incarne aussi la possibilité d’une alternance politique qui participe à l’existence du pluralisme politique. Enfin, l’opposition permet de renouveler le personnel politique.
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(de gauche à droite) TABERA RAMAMANTSOA, Siteny RANDRIANASOLONIAIKO, Rivo RAKOTOVAO et Marc RAVALOMANANA
Crédit photo: Marc Ravalomanana Ofisialy
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